Je reconnais volontiers être infantile ... sans guillemets ni parenthèses ... Cet aveu est une affirmation, une manière rare de s' exprimer aujourd' hui dans les café-philos où la presque quasi-totalité des déclarations des participants est réduite à l' état de ce qui est nommé "hypothèse" (entre guillemets).
... on en arrive à ne plus pouvoir dire quoi que ce soit, à empêcher que la parole ait pour rôle d' énoncer et présenter des faits ... ce qui est pourtant sa première et essentielle vocation en toute situation et en tout lieu ... (ce qui ne signifie pas pour autant qu' il soit interdit de parler pour ne rien dire !)
Comment pourrait-il y avoir philo si la fiction se substitue au réel, si les opinions, les suppositions envahissent tout le champ du débat ?
Les faits sont-ils donc bânnis ? Faut-il dissimuler la présentation d' un fait en enrobant son discours de sorte que "fait" se transforme en soi-disant "hypothèse" ... afin de ne pas contrarier les discours anesthésiants de l' air du temps et, de ce fait, ne pas provoquer la fermeture d' oreilles susceptibles ou lassées des affirmations ?
Est-il donc interdit, sous prétexte de respecter une "méthodologie philosophique d' avant-garde (??)", de parler par affirmations, de pouvoir dire, expliciter, attirer l' attention sur des faits et des habitudes de parler qui favorisent les dénégations de l' air du temps ?
Est-il donc interdit de contester cette déclaration péremptoire affirmant qu' un débat philo n' a pas de fin, qu' une question ne peut aboutir que sur une autre question qui elle-même etc ... ?
... mais s' agit-il vraiment de questions ? ne serait-ce pas plutôt des suppositions, des suppositions qui, souvent, ne sont même pas des hypothèses ? Confondre supposition et question !!!
Il est vrai que si le débat se réduit à énoncer des suppositions alors non seulement il n' y a pas de fin mais une méthode d' organisation et de conduite du débat s' avère nécessaire voire indispensable.
Et pour cause : s' il n' y a pas de contenu factuel, nous sommes dans le débat d' idées et la perception du réel ne peut donc pas par sa vérité et sa logique propre (logique qui à elle seule induit sa méthodologie propre) organiser le débat.
En effet, les faits, eux, ne partent pas dans tous les sens comme les idées; ils sont reliés les uns aux autres de façon cohérente et vraie.
Voilà ce que je constate (un constat et non une "hypothèse").
La philo (et cette déclaration est encore une affirmation qui a pour vocation d' énoncer un fait et non une "hypothèse") n' est donc pas un débat d' idées; c' est un débat sur des faits et notamment sur nos manières de nous exprimer, de nous comporter et d' agir au quotidien.
Le débat d' idées est la ruine de la philo; nous parlons pour ne rien dire et, plus souvent qu' on ne le pense, nous sommes, sans nous en rendre compte, sous les dictats implicites des spécialistes en organisation de débats "philosophiques".
L' organisation artificielle des débats mise en place par les spécialistes en débats philosophiques n' a rien à voir avec la cohérence et la logique des faits; percevons cette cohérence naturelle au lieu de nous fatiguer à organiser une cohérence artificielle qui nous égare en privilégiant la forme (autrement dit les idées) au détriment du fond (autrement dit le réel).
Cette perception sensible n' est-elle pas l' essence et la source de la philo ? Ceci est une question pas une idée supposée !
S' exprimer dans un café philo n' est pas "un plus"; c' est la vocation même de ce lieu et se taire alors que l' on a quelque chose à dire est une attitude pour le moins bizarre (hormis la timidité) qui sous-entend que la prise de parole est une faveur condescendante accordée par un maître-animateur ...
Ce n' est pas ainsi que je considère le café philo; au contraire, il s' agit d' écarter de ce lieu tout idée et sentiment de privilège et d' élite.
Le mot "animateur" est anti-philosophique : il implique que les participants n' ont rien à dire de factuel et authentique; d' où la nécessité de les secouer pour les faire parler !!! (Et pour secouer efficacement des gens qui n' ont rien à dire de factuel il faut évidemment une méthode efficace d' organisation et de conduite de débats pour les amener à s' exprimer "efficacement" et éviter que "ça parte dans tous les sens" ...)
Pour des gens qui prétendent faire acte philosophique ça aussi c' est pour le moins bizarre.
Ecartons donc ce mot d' animateur parce qu' en philo il n' y a rien à animer; la philo ne consiste pas à présenter des idées.
Voilà ce que j' ai à dire; et n' en déplaise à certains, je ne suis ni rapide ni relaxant ni "super-sympa"...